top of page

Analyse urbaine

Perméabilité

 

 

Une façon d’envisager la notion de perméabilité dans l’Emscher Park se trouve dans le niveau d’imbrication entre le parc régional et les continuités au sein des nouvelles interventions. En ce sens, l’exemple de Schüngelberg est intéressant puisque le nouvel espace vert central est directement en lien avec la forêt industrielle faisant partie de la trame verte régionale [1]. À l’inverse, Duisbourg est fortement enclavé par l’environnement bâti existant. Néanmoins, le quartier est connecté au réseau cyclable via le segment de la Reviers Rad. La perméabilité entre les nouveaux et les anciens quartiers est remarquable, car les tracés des rues existantes sont poursuivis. De plus, de nouvelles promenades et l’ajout d’une passerelle piétonne permettent un meilleur accès aux rives, précédemment conscrites par l’industrie. Si les nouvelles rues de Schüngelberg ne sont pas nécessairement continues avec celles existantes, une perméabilité visuelle est crée grâce à l’espace vert central venant imbriquer le nouveau et le récent [2]. En ce qui concerne la perméabilité entre l’interface publique et privée, les deux projets misent fortement sur la disposition de perimeter block development. Dans le cas de Duisbourg, ce sont de nouveaux blocs aux dimensions similaires à ceux des quartiers voisins (rues rapprochées entre elles favorisant de multiples alternatives de trajets). L’exemple de Schüngelberg mise davantage sur des îlots rectangulaires où les cours arrière s’adossent entre elles (conservation du caractère privé de celles-ci) [3]. Si globalement la stratégie fonctionne, elle peut s’avérer plus ambiguë à la rencontre de deux typologies différentes ou de jonctions de rues aux tracés angulaires. Il en découle une exposition directe des espaces privés aux autres habitants obligeant l’ajout de clôture opaque, ce qui nuit au caractère public de la rue. La présence d’un espace végétal semi-privé à l’avant des logements crée un seuil robuste permettant l’appropriation de celui-ci par les usagers et augmente la perméabilité des échanges entre le public et le privé [5]. À l’opposer, les ensembles de Duisbourg n’ont aucun seuil au rez-de-chaussée, créant une rupture nette entre le logement et la rue et nuisant ainsi aux possibilités d’échanges. Par contre, la hauteur surélevée du rez-de-chaussée évoquant la conservation du caractère privé du balcon, malgré la proximité de la rue et la présence de loggia, vient renforcer l’interface public-privé. Finalement, les deux cas de villes conservent des rues étroites avec peu de stationnements, favorisant la mobilité douce, tout en conservant la perméabilité pour tous les types de transports. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 
 

 

 

 

 

Lisibilité

 

L’intérêt principal de Schüngelberg est l’importante lisibilité que le schéma de la ville accorde au terril réaménagé qui devient indéniablement le point de repère du quartier. Le terril s’inscrit sur le réseau de la route du patrimoine industriel de l’Emscher Park. L’axe central relie la place, autour de laquelle se regroupent les espaces communautaires, au terril. Cet axe devient le chemin qui procure la plus grande clarté et lisibilité. Cela est renforcé par les maisons en rangées sur deux niveaux qui créent un fort encadrement. L’impact négatif sur le plan est une fois de plus à la jonction des différentes rues et géométries du quartier. Les nœuds sont peu lisibles par leur faible encadrement ou sinon ambigus lorsque la rue se termine sur le côté d’une maison. Le même phénomène est observé lorsque le tracé des rues qui aurait dû être continu s’arrête sur un mur mitoyen aveugle avant de se poursuivre. L’impression est celle d’un cul-de-sac. Ironiquement, l’axe central mise fortement sur la continuité en poursuivant les bâtiments par-dessus la rue pour se prolonger vers le terril. Ce pont devient un marqueur de séquence fort sans qu’il marque pour autant une transition entre deux entités distinctes le rendant ainsi peu signifiant. Finalement, la renaturalisation de l’ancien canal en espace vert sert de limite claire entre le la fin de la ville et le début de l’espace ouvert.

 

À Duisbourg, il existe plusieurs éléments remarquables que ce soit d’ordre architectural ou naturel qui permettent de créer une lisibilité à l’échelle du quartier. Cependant, la jonction des voies ne fait pas toujours honneur aux efforts déployés dans la mesure où le retrait de ces éléments par rapport aux parcours importants devrait être compensé par un travail adéquat des noeuds. Ainsi, les éléments remarquables sont signifiants dans l’expérience quotidienne du lieu pour les habitués, mais peu lisible. Parmi ces éléments marquants, il est possible de noter la nouvelle passerelle piétonne qui devient un noeud à la jonction du port, le  Küppersmühle, gigantesque usine reconvertie en musée d’art contemporain, ainsi que plusieurs bâtiments récents issus de concours d’architecture. La lisibilité de la rue se manifeste particulièrement dans la partie des développements résidentiels où l’étroitesse de la rue combinée à une densité verticale forme un fort encadrement. Quant à elle, la lisibilité de la rue piétonne est plus problématique aux abords des rives. Considérant le fait qu’il s’agisse du principal lieu de mixité fonctionnel, le manque d’encadrement est fortement contradictoire avec les intentions que l’on y porte. Ce manque d’encadrement et de lisibilité s’explique par l’absence de mesure compensatoire le long des bâtiments à grande échelle séparés les uns des autres et non alignés. Enfin, le noeud/marqueur de séquence terminant le tracé de rue existante semble particulièrement efficace pour susciter la découverte vers les canaux.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 
 
 
 

 

 

Variété

 

L’analyse de variété ou mixité du cas de Schüngelberg doit d’abord prendre en compte qu’il s’agit d’un secteur à vocation fortement résidentielle, étant donné la localisation périphérique et l’échelle du quartier. Ainsi, l’absence de lieu de travail ou de commerce de proximité dans le secteur suggère une désaffectation du quartier le jour et une dépendance à la voiture pour accéder aux services à l’extérieur du quartier. Néanmoins, la réhabilitation du projet inclut plusieurs espaces communautaires à la jonction des rues principales ainsi que du nouveau et de l’ancien quartier. De plus, une attention particulière a été portée aux typologies d’habitations qui sont à la fois des logements, de l’unifamilial, des appartements pour personnes âgées (Gentges,  2011). Le projet n’inclut cependant pas de logements abordables, ce qui laisse supposer que la population à faible revenu présente avant la rénovation des 200 logements existants n’ait pas les moyens de retourner sur place après la réhabilitation de la cité-jardin. Dans le cas de Duisbourg, plusieurs des 450 logements sont destinés aux personnes à faibles revenus, aux étudiants, aux personnes à mobilité réduite ainsi qu’aux familles (Gentges, 2011). Celles-ci profitent notamment d’espaces communs en coeur d’îlot destinés aux enfants. Cependant, le caractère fermé de cet espace en cour arrière et la forte orientation fonctionnelle des lieux le rend difficilement appropriable par une autre clientèle. Dans le même ordre d’idée, la création du parc rendant hommage aux vestiges industriels à la jonction des quartiers existants semble à la base un bon moyen de réunir différentes clientèles. Or, le faible niveau d’ouverture de la rue vers cet espace, l’absence d’activités autres que récréatives et la présence de cour arrière donnant sur le parc nuisant au caractère public de l’espace font de cet aménagement un lieu peu propice à la variété. La situation est tout autre sur les bords des rives où la reconversion des anciennes industries en musée, logements, commerces et bureaux favorise un usage différencié de l’espace public en face des berges. D’ailleurs puisque ces espaces sont aménagés en rues piétonnes, ils deviennent des lieux d’intérêt pour les résidents. La requalification du port et le déploiement d’une architecture de qualité (contributions de Foster et Herzog et de Meuron) en font un pôle majeur d’attractivité pour l’investissement dans le secteur tertiaire qui vient complémenter la forte présence industrielle. Les bureaux alimentent les berges et les commerces le jour, alors que les équipements culturels, les logements, les restaurants et l’éclairage architectural stimulent l’utilisation nocturne des lieux. 

En ce qui à trait à l’analyse urbaine par la méthode de Bentley, il a été choisi de prendre deux projets de requalification urbaine incluant un part importante de logements. Cette situation est contrastante avec la grande majorité des autres interventions sur le territoire, mais correspond mieux à l’échelle et aux propos de responsive environments. Duisbourg et Schüngelberg ont été choisi puisqu’ils sont souvent cités en exemple. L’un s’attarde davantage à un quartier urbain dense alors que l’autre s’inscrit dans un cadre périurbain.

Philippe Charest, Catherine Gagnon Leblanc, Kevin Mark, Marie-Camille Richard

Travail présenté dans le cadre du cours Concepts et méthodes en Design Urbain (ARC 6033) à l'automne 2013

bottom of page